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Le Velours Souterrain (International)
19 mars 2007

welcome to jamaica

vendredi 9 mars

Nous arrivons à kingston sous un ciel menaçant et une pluie diluvienne, et à peine sortis de l'aéroport, nous nous faisons harponner par un chauffeur de taxi odieux qui nous explique que seul un ATM à des km à la ronde acceptera nos cartes de crédit, et que seul lui peut nous y emmener. A l'abri dans le taxi, nous traversons la ville qui s'apparente à un shantytown géant tandis que des enfants en uniforme arpentent les rues, ou plutôt les rivières d'eau boueuse qui tiennent lieu de rues. Le chauffeur nous explique que nous traversons trenchtown, et ce n'est pas tout à fait aussi groovy que dans la chanson de bob marley - en fait c'est le pire quartier de la ville, où les aventureux auteurs du lonely recommandent de ne pas mettre les pieds. Les gens nous regardent traverser le dépotoir qui leur sert de ville avec indifférence/incrédulité/hostilité. Un quart d'heure plus tard, la tôle ondulée n'a toujours pas disparu, elle est même omniprésente, nous demandons au chauffeur si nous allons un jour arriver à downtown - ah, il paraît que nous y sommes déjà depuis belle lurette et que nous arrivons maintenant à uptown, le quartier chic, où se trouve notre hôtel. Nous voilà rassurés.

            SANY0531

Nous n’hésitons pas longtemps avant de modifier notre programme : pas question de passer une seconde de plus dans cette ville, et nous demandons donc au chauffeur de nous emmener à la station de bus. Nous retraversons donc dowtown, et nous arrêtons dans une zone particulièrement animée, devant ce qui ressemble à l’entrée d’un marché. Après nous avoir extorqué 3000 jamaican dollars (probablement l’équivalent d’un mois de salaire), le chauffeur remet notre destin entre les mains d’un de ses comparses, qui nous dit d’un air dramatique de le suivre de près.

Nous franchissons le porche du « transportation center » et nous trouvons dans une sorte de terrain vague grouillant de monde et de minibus blancs rouillés ; notre protecteur nous emmène d’un air décidé vers un bus ; nous le suivons, bien que ledit bus semble plein à craquer ; nous apprenons bientôt que « plein à craquer » est une notion toute relative en ce qui concerne les transports en jamaïque. On nous indique une place vers l’avant, et une autre tout au fond : derechef, j’attrape le bras de martin et le secoue frénétiquement pour lui signifier que je refuse catégoriquement d’être assise à des km de lui dans ce bouge affreux (lui aussi semble légèrement inquiet). Entre temps, un grand gaillard est arrivé et a commencé à nous fusiller du regard avec application : l’une des deux places libres se trouve être la sienne. Nous tournons les talons et nous dirigeons, menés par notre parrain, vers un minibus vide où nous nous installons.

Aussitôt assis, nous nous trouvons au centre d’un concert de beuglements (premier contact avec le patois jamaïcain, qui est censé dériver de l’anglais, mais déroute même les anglicistes les plus aguerries) entre divers individus qui semblent se battre pour obtenir quelque chose de nous (mais étant donné notre niveau de compréhension, ils pourraient tout aussi bien être en train de parler de la coupe du monde de cricket). Profitant d’une accalmie, notre parrain – qui est en fait, comme tout parrain qui se respecte, un fieffé scélérat – tend la main d’un air avide ; martin, bon prince, lui tend un billet de 100 J$ (1,5$), et reçoit en retour un regard scandalisé et un flot de menaces; le saligaud repartira finalement avec 500 J$, ce qui est autrement mieux rémunéré.


Alors que nous attendons que le bus se remplisse (il manque donc une cinquantaine de passagers, selon les standards jamaïcains), divers vendeurs ambulants se pressent à nos fenêtres pour nous vendre, au choix, des donuts luisants de graisse, des coton-tige ou des mocassins en daim. Une petite vieille habillée comme une schoolteacher des années 50, avec un serre-tête et une jupe crayon qui ne déplairaient pas aux rédactrices du dernier ELLE, s'installe devant moi et se retourne aussitôt pour nous chuchoter d'un air mystérieux "surveillez bien vos porte-monnaies, ils en veulent à votre argent". Nous nous impatientons d'autant plus que ce bus semble vouloir égaler le fameux sauna de la rue de beauséjour, et que nous coulons donc une bielle. Nous avons tort de piaffer: nous apprendrons bientôt à nos dépens qu'en jamaïque, un bon bus est un bus immobile.

Notre chauffeur étant apparemment la proie d'une hallucination le persuadant qu'il est au volant, non pas d'un minibus branlant et plein à craquer, mais d'une formule 1, le long trajet vers Negril est une épreuve difficilement supportable -- à condition de voir la route, ce qui n'est pas mon cas, grâce à la coiffure volumineuse de cette chère schoolteacher qui obstrue mon champ de vision. Je laisse donc la parole à mon compagnon de route, qui va tenter de mettre des mots sur ce traumatisme qui le ronge encore aujourd'hui.

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Commentaires
P
...le paquet de 200 coton-tiges qu'on a été obligés d'acquérir à prix d'or afin de calmer la foule des vendeurs ambulants. la tour eiffel miniature qui en a résulté gît encore sur quelque plage ensoleillée
V
J'aime mieux la photo des pieds sur ton blog, Hélène...j'avais presque envie d'y aller, en Jamaïque...
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